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Rencontre avec Shérazade Laoudedj, fondatrice des Joyaux de Sherazade

« La Cuisine est L’art de faire plaisir tout simplement. L’art de créer, d’innover, de tester, de doser et d’inventer »

Qui est Shérazade Laoudedj ?

Née à Oran en Algérie, j’ai passé mon enfance et une partie de mon adolescence dans cette belle ville, puis sur Remchi à Tlemcen. Je me suis mariée à l’âge de 24 ans et vis depuis 14 ans en France. Je suis maman de 3 enfants âgés respectivement de 12, 10 et 8 ans. J’ai poursuivi des études en médecine (6° année). Je suis auteur culinaire du site Les Joyaux de Sherazade que j’ai créé de A à Z en démarrant l’aventure en 2011. J’ai réalisé un premier ouvrage, « Les joyaux de cuisine algérienne » qui a été vite en rupture de stock en France et en Algérie. Je suis photographe culinaire, chroniqueuse cuisine sur la chaîne TV France 2 et chef de l’émission Lamset Chahrazad sur la chaîne Samira TV avec 55 émissions enregistrées à ce jour.

Comment vous est venue l’envie de devenir blogueuse culinaire ?

Une « desperate house wife » qui avait envie d’occuper son temps. J’avais une vie très chargée avec mes études puis j’ai décidé de me consacrer à temps plein à mes passions, et de vous à moi j’avais perdu l’envie de devenir médecin. Je me suis mise à cuisiner et ma passion a grandi jour après jours. J’avais une grande soif d’apprendre et le désir de nourrir sainement ma petite tribu. J’adore confectionner les pâtissières algériennes et je prends un grand plaisir à varier les goûts et les formes. J’avais pour habitude d’en réaliser lors des kermesses (fête de fin d’année des écoles) et la directrice de l’école de mes enfants, qui elle-même est auteure de livres pour enfants, m’a suggéré de faire des livres ou du moins de commencer par un blog et ce fut un déclic voire une révélation pour moi. Le projet du blog est né et année après année il est devenu ce qu’il est à présent, à savoir l’un des blogs les plus fréquentés en Algérie et en France.

Pourquoi avoir choisi le prénom Shérazade ?

Pourquoi Shérazade, très bonne question. Mon véritable prénom est Fatima Zohra, lorsque j’ai eu l’envie de créer un blog, il fallait bien lui trouver un nom. Mon cher et tendre époux, qui était le premier fan de mes pâtisseries trouvait que c’était de vrais joyaux. Il me disait qu’elles venaient tout droit des milles et une nuit, et nous renvoyaient à Shérazade. Le nom les joyaux de Shérazade est ainsi né et avec lui mon nom de figure publique. Désormais partout dans le monde on m’appelle ainsi.
On constate à travers le nom donné à votre blog et vos présentations culinaires, que vous vous inspirez du patrimoine Algérien. Comment vous est venue l’idée de présenter l’art culinaire à travers notre riche histoire ?
Notre histoire me fascine, elle est unique et a fait de nous un peuple unique. Nous aimons avec passion et nous détestons avec passion aussi (Rire). Notre cuisine s’est construit avec le temps, elle est la somme des apports des multiples civilisations qui nous ont rendu visite. Des berbères jusqu’aux français, la cuisine s’est enrichie, et la femme algérienne continue à la faire évoluer. Chez nous la cuisine est une histoire de femmes et elle se raconte par des femmes, même si les plus grands chefs cuisiniers sont des hommes. Nous exprimons notre amour à nos proches en leur cuisinant les mets les plus succulents. Il est bien connu que le plus court chemin pour toucher le cœur d’un homme est son estomac !

Vous avez l’art de présenter la cuisine en vous basant sur des produits locaux, naturels et sains. Est-ce là une invitation, aux amoureux de la cuisine, à renouer avec ce pan de notre patrimoine ?

Oh que oui, dans les recettes sélectionnées pour l’émission de Shérazade, j’ai décidé d’utiliser des produits de saison, disponibles en Algérie et à la portée de quasiment toutes les bourses. Il était inconcevable de cuisiner avec des produits que mes amies et sœurs auraient du mal à trouver. Et du coup, naturellement, on se retrouve avec des produits locaux… Les étals prouvent qu’il existe une large gamme de produits locaux, frais et sains, il fallait juste montrer le chemin et prouver que l’on peut faire des merveilles avec ces beaux produits. Vous savez à l’étranger, je regrette notre tomate juteuse et bien rouge, cette orange au goût unique et cette datte inégalable. J’insiste sur le fait que nos produits sont sains et bons naturellement. Le climat est adapté. Je rêve du jour où nous n’aurons plus besoin d’importer quoi que ce soit, nous pouvons tout cultiver sur nos terres arables.

Vous encouragez l’utilisation de certains produits oubliés de nos jours, en préconisant par exemple, l’introduction de l’huile d’arachide dans la pâtisserie. Est-ce un choix purement personnel ou une façon de faire revivre ces produits portés disparus de nos cuisines ?

C’est une façon de dire qu’il est temps d’écrire l’histoire de notre cuisine, car il sera trop tard par la suite, et j’espère que je serai écoutée. Cette mémoire vivante, ce sont nos mères et nos grands-mères qui la portent, et elle disparaîtra avec elles si nous ne prenons pas soin de l’écrire. C’est un devoir et une urgence. Il s’agit d’un patrimoine inestimable, hélas encore trop méconnu de la plupart des algériens et que dire des publics hors Algérie! Je le dis et le confirme nous avons l’une des cuisines les plus riches au monde. Cette cuisine est des plus variées, des plus saines, des plus colorées et ensemble, bi idni Allah, nous arriverons à conserver jalousement ce trésor pour pouvoir le transmettre avec fierté aux générations futures. Il s’agit là d’un vœu pieux.

Qu’en est-il de vos recettes, sont-elles un héritage respecté à la lettre ou prenez-vous parfois la liberté de revisiter nos classiques culinaires à votre façon ?

J’ai du mal à respecter les recettes à la lettre sauf si je dois la noter pour l’archiver. C’est important de connaitre les recettes originales, mais il ne faut pas s’enfermer. C’est ce qui fait la beauté de la cuisine et c’est ce qui la rend intéressante.

Il est temps de passer aux petites confidences à présent (Rire), Quels ustensiles vous sont les plus indispensables en cuisine ?

Pas mal (Rire), j’ai une cuisine bien équipée, je suis une fan d’ustensiles de cuisine, je teste tout ce que je peux trouver. En revanche, si je dois en citer un, ça serait notre fierté, je nomme le couscoussier.

Quelle est pour vous la signification de l’Art culinaire ?

L’art de faire plaisir tout simplement. L’art de créer, d’innover, de tester, de doser, d’inventer.

Si vous deviez classifier vos préférences culinaires, quel serait ce classement ?

Algérienne, méditerranéenne, une cuisine très saine à base de beaucoup de légumes, et Indienne, une alchimie de saveurs nous venant du pays roi des épices.

Quel est votre ingrédient fétiche ?

J’ai découvert au fil du temps des ingrédients incroyables, il m’est donc difficile d’en ressortir un en particulier. Au-delà des ingrédients, le plus intéressant est l’association de plusieurs d’entre eux tout en conservant un maximum les saveurs et essences. Le savant dosage de cette alchimie est une partie passionnante.

Quelle est votre recette favorite ?

à brûle-pourpoint, je dirai le couscous car il est possible de le décliner en plus de 300 recettes aussi intéressantes les unes que les autres.Rencontre avec Shérazade Laoudedj, fondatrice des Joyaux de Sherazade

Que trouve-t-on toujours dans votre réfrigérateur personnel ?

Du lait, du beurre, des œufs, des yaourts pour les enfants, des légumes.

Si vous n’aviez que 15 minutes pour préparer un mets, lequel choisiriez-vous ?

Temps de préparation ou cuisson compris (Rire), il y’a plein de chose à faire, mais pour faire simple et avec du goût, un poulet tikka et son riz aux raisins. Recette rapide et qui fait l’unanimité chez moi !

Quel est le meilleur conseil qu’on vous ait donné en cuisine ?

Respecter les produits qui entrent dans la composition de la recette. Ceci est vrai que ce soit pour la viande utilisée, les légumes que pour les fruits, etc.

Si vous deviez nous dévoiler une seule de vos astuces culinaire, quelle serait-elle ?

Mon smen maison à l’algérienne, il est sublime, et ça peut transformer un plat ou un gâteau simple en une véritable merveille. On met à fondre le beurre, on ajoute de la semoule d’orge ou de la grosse semoule de blé, et on laisse la magie opérer. Je le fais tout le temps et je conserve le smen dans un bocal à portée de main sur le plan de travail

La recette ou réalisation dont vous êtes la plus fière ?

Mes mchewek avec l’ajout de la purée de pommes de terre que j’ai présenté dans la spécial kahwat el asser. Je vous invite à tester cette version, c’est topissime !

Une recette qui vous intimide ou que vous ne réussissez pas toujours au premier coup ?

Euhhhhhh je ne sais pas, ah oui el rougag (trid) c’est pas si simple pour moi!

Quelle est la pire chose que l’on puisse vous servir à manger ?

Bouzellouf et dowara. Alors qu’on soit d’accord, je cuisine ça super bien d’après mon époux, mais je suis incapable de les manger. Donc si vous m’invitez et que vous me les servez, soyez sûr que je n’en mangerai pas.

Votre plus belle rencontre gastronomique à ce jour ?

Alain Ducasse

Vos chefs préférés ?

Alain Ducasse.

Pour finir, que conseilleriez-vous aux futurs cuisiniers et passionnés qui se lancent dans ce domaine ?

Faites-vous plaisir, prenez du plaisir, et croyez en vous. Confiance et plaisir sont les 2 mots clés pour durer et pourquoi pas percer !



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